vendredi 4 mai 2012

Lecture du jour : la musique sacrée et Jean-Paul II (7)

10. L'Eglise ayant toujours reconnu et favorisé le progrès des arts, il ne faut pas s'étonner que, outre le chant grégorien et la polyphonie, elle admette également de la musique plus moderne dans  les célébrations, à condition qu'elle respecte l'esprit des valeurs véritables de l'art. Il est donc consenti aux Eglises présentes dans les différentes nations de valoriser, dans les compositions destinées au culte, "ces formes particulières qui constituent d'une certaine manière le caractère spécifique de la musique qui leur est propre" (27). Dans la lignée de mon saint prédécesseur et de ce qu'a établi, plus récemment, la Constitution Sacrosanctum Concilium (28), moi aussi, dans l'Encyclique Ecclesia de Eucharistia, j'ai souhaité offrir une place aux nouvelles contributions musicales en mentionnant, à côté des mélodies grégoriennes inspirées, les "nombreux auteurs, et bien souvent grands auteurs, qui se sont mesurés aux textes liturgiques de la Messe" (29).
11. Le siècle dernier, avec le renouveau opéré par le Concile Vatican II, a connu un important développement du chant religieux populaire, dont Sacrosanctum Concilium dit:  "Le chant religieux populaire sera intelligemment favorisé, pour que dans les exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques elles-mêmes, [...] les voix des fidèles puissent se faire entendre" (30). Ce chant se révèle particulièrement adapté à la participation des fidèles non seulement aux pratiques de dévotion, "conformément aux normes et aux prescriptions des rubriques" (31), mais également à la Liturgie elle-même. En effet, le chant populaire constitue  "un  lien  d'unité  et d'expression joyeuse de la communauté en prière, [...] favorise la proclamation de la même foi et confère aux grands rassemblements liturgiques une incomparable solennité empreinte d'intériorité" (32).
12. Concernant les compositions musicales liturgiques, je fais mienne la "loi générale", que saint Pie X formulait en ces termes:  "Une composition pour église est d'autant plus sacrée et liturgique qu'elle s'approche de la mélodie grégorienne du point de vue du rythme, de l'inspiration et du goût; mais plus on perçoit qu'elle est éloignée des formes de ce modèle suprême, moins elle est digne du temple" (33). Il ne s'agit pas, bien évidemment, de copier le chant grégorien, mais plutôt de faire en sorte que les nouvelles compositions soient imprégnées du même esprit qui suscita et, au fur à mesure, modela ce chant. Seul un artiste profondément pénétré du sensus ecclesiae peut tenter de percevoir et de traduire en mélodie la vérité du Mystère qui est célébré dans la Liturgie (34). Dans cette perspective, j'écrivais dans la Lettre aux artistes:  "Combien de compositions sacrées ont été élaborées, au cours des siècles, par des personnes profondément imprégnées du sens du mystère! D'innombrables croyants ont alimenté leur foi grâce aux mélodies qui ont jailli du coeur d'autres croyants et sont devenues partie intégrante de la liturgie, ou du moins concourent de manière remarquable à sa digne célébration. Par le chant, la foi est expérimentée comme un cri éclatant de joie et d'amour, une attente confiante de l'intervention salvifique de Dieu" (35).
Une considération renouvelée et plus approfondie des principes qui doivent être à la base de l'élaboration et de la diffusion d'un répertoire de qualité est donc nécessaire. Ce n'est que de cette manière que l'on permettra à l'expression musicale de servir de façon appropriée son but ultime qui est "la gloire de Dieu et la sanctification des fidèles" (36).
Je sais bien qu'encore aujourd'hui ne manquent pas les compositeurs capables d'offrir, dans cet esprit, leur contribution indispensable et leur collaboration compétente pour enrichir le patrimoine de la musique au service d'une Liturgie qui soit toujours plus intensément vécue. Je leur exprime toute ma confiance, unie à l'exhortation la plus cordiale à consacrer toute leur énergie pour enrichir le répertoire de compositions qui soient dignes de l'élévation des mystères célébrés et, dans le même temps, adaptées à la sensibilité actuelle.

Extrait du CHIROGRAPHE DU SOUVERAIN PONTIFE  JEAN-PAUL II POUR LE CENTENAIRE DU MOTU PROPRIO “PARMI LES SOLLICITUDES” SUR LA MUSIQUE SACRÉE  (2003)  

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