10. L'Eglise ayant toujours reconnu et favorisé le
progrès des arts, il ne faut pas s'étonner que, outre le chant grégorien
et la polyphonie, elle admette également de la musique plus moderne
dans les célébrations, à condition qu'elle respecte l'esprit des
valeurs véritables de l'art. Il est donc consenti aux Eglises présentes
dans les différentes nations de valoriser, dans les compositions
destinées au culte, "ces formes particulières qui constituent d'une
certaine manière le caractère spécifique de la musique qui leur est
propre" (27). Dans la lignée de mon saint prédécesseur et de ce qu'a
établi, plus récemment, la Constitution
Sacrosanctum Concilium (28), moi aussi, dans l'Encyclique
Ecclesia de Eucharistia,
j'ai souhaité offrir une place aux nouvelles contributions musicales en
mentionnant, à côté des mélodies grégoriennes inspirées, les "nombreux
auteurs, et bien souvent grands auteurs, qui se sont mesurés aux textes
liturgiques de la Messe" (29).
11. Le siècle dernier, avec le renouveau opéré par le
Concile Vatican II, a connu un important développement du chant
religieux populaire, dont
Sacrosanctum Concilium
dit: "Le chant religieux populaire sera intelligemment favorisé, pour
que dans les exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques
elles-mêmes, [...] les voix des fidèles puissent se faire entendre"
(30). Ce chant se révèle particulièrement adapté à la participation des
fidèles non seulement aux pratiques de dévotion, "conformément aux
normes et aux prescriptions des rubriques" (31), mais également à la
Liturgie elle-même. En effet, le chant populaire constitue "un lien
d'unité et d'expression joyeuse de la communauté en prière, [...]
favorise la proclamation de la même foi et confère aux grands
rassemblements liturgiques une incomparable solennité empreinte
d'intériorité" (32).
12. Concernant les compositions musicales liturgiques,
je fais mienne la "loi générale", que saint Pie X formulait en ces
termes: "Une composition pour église est d'autant plus sacrée et
liturgique qu'elle s'approche de la mélodie grégorienne du point de vue
du rythme, de l'inspiration et du goût; mais plus on perçoit qu'elle est
éloignée des formes de ce modèle suprême, moins elle est digne du
temple" (33). Il ne s'agit pas, bien évidemment, de copier le chant
grégorien, mais plutôt de faire en sorte que les nouvelles compositions
soient imprégnées du même esprit qui suscita et, au fur à mesure,
modela ce chant. Seul un artiste profondément pénétré du
sensus ecclesiae peut tenter de percevoir et de traduire en
mélodie la vérité du Mystère qui est célébré dans la Liturgie (34).
Dans cette perspective, j'écrivais dans la
Lettre aux artistes:
"Combien de compositions sacrées ont été élaborées, au cours des
siècles, par des personnes profondément imprégnées du sens du mystère!
D'innombrables croyants ont alimenté leur foi grâce aux mélodies qui ont
jailli du coeur d'autres croyants et sont devenues partie intégrante de
la liturgie, ou du moins concourent de manière remarquable à sa digne
célébration. Par le chant, la foi est expérimentée comme un cri éclatant
de joie et d'amour, une attente confiante de l'intervention salvifique
de Dieu" (35).
Une considération renouvelée et plus approfondie des
principes qui doivent être à la base de l'élaboration et de la diffusion
d'un répertoire de qualité est donc nécessaire. Ce n'est que de cette
manière que l'on permettra à l'expression musicale de servir de façon
appropriée son but ultime qui est "la gloire de
Dieu et la sanctification des fidèles" (36).
Je sais bien qu'encore aujourd'hui ne manquent pas les
compositeurs capables d'offrir, dans cet esprit, leur contribution
indispensable et leur collaboration compétente pour enrichir le
patrimoine de la musique au service d'une Liturgie qui soit toujours
plus intensément vécue. Je leur exprime toute ma confiance, unie à
l'exhortation la plus cordiale à consacrer toute leur énergie pour
enrichir le répertoire de compositions qui soient dignes de l'élévation
des mystères célébrés et, dans le même temps, adaptées à la sensibilité
actuelle.
Extrait du CHIROGRAPHE DU SOUVERAIN PONTIFE JEAN-PAUL II POUR LE CENTENAIRE DU MOTU PROPRIO “PARMI LES SOLLICITUDES” SUR LA MUSIQUE SACRÉE (2003)
Extrait du CHIROGRAPHE DU SOUVERAIN PONTIFE JEAN-PAUL II POUR LE CENTENAIRE DU MOTU PROPRIO “PARMI LES SOLLICITUDES” SUR LA MUSIQUE SACRÉE (2003)
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